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Réseau d'échange des savoirs de Trouville la Haule

06 May

Rencontre écriture 5-05-2022

Publié par Vice versa

Coucou nous revoilou

les sujets du jour étaient :

Vous me demandez si j'ai aimé

ou Au sein des falaises de craies nichées sur un lit d’herbe fraîche

voici nos textes

Sylvie Commare :

Vous me demandez si j’ai aimé.

La question est peut — on vivre sans aimer ?

Et je vous répondrais

D7s mon premier souffle, malgré l’air ambiant qui me brûlait la poitrine, j’ai aimé.

J’ai aimé les mains soyeuses de la sage femme qui me baignait, j’ai aimé la chaleur du corps de ma mère, je me suis délectée de la voix sensible et joyeuse de mon père. J’ai dévoré gloutonnement le lait tiède de mon biberon. J’ai humé follement les parfums enivrants des femmes virevoltant autour de moi, me prenant dans leurs bras, s’extasiant de mes moindres mimiques.

Je n’ai pas aimé, j’ai adoré avec passion, le ressac de la mer, les cliquetis des bateaux dans le port de Fécamp, les facéties des mésanges bleues et des rouges gorges prétentieux, jusqu’à en avoir la chair de poule. J’ai communié de tout mon être avec mère Nature, mes pieds dans sa terre, mon corps dans la brise, mes bras enlaçant l’horizon et ma tête dans les nuages, ne faisant qu’un avec le cosmos ; oui j’ai aimé avec passion à m’en brûler les ailes, à perdre la raison en même temps que je souffrais atrocement de la laideur du monde..

 J’ai transcendé l’abject avec mes coquelicots bleus et mes tourbillons de feu, loin des paradis artificiels. Poésie, nous avons flirté de longs mois ensemble dans le temple de nature de Baudelaire où les couleurs et les sons se répondent, puis nous avons voyagé sur la chenille de 18 mètres de Desnos pour voler le tableau noir du malheur du cancre de Prévert.

Oui j’ai aimé autant que j’ai souffert et ne veux rien changer.

Ai -je aimé d’amitié ? : oui d’une affection exclusive et possessive, ambiguë parfois dans les affres de mon adolescence tourmentée.

Ai je aimé avec un grand A ? : Oui, précocement et étonnamment timidement. La peur au ventre de perdre ma liberté, de m’attacher, et de perdre l’être aimé. Le temps a eu raison de mes réticences, 20 longues années peut — être et j’ai enfin accepté mon homme dans sa totalité et je n’ai plus mis de frein à notre bonheur dans ce monde éphémère.

J’ai aimé comme une mère louve mes petits et les ai défendus crocs et griffes, je les ai cependant, par amour véritable, guidés vers leur indépendance. J’ai versé des larmes d’encre et de sang à leur départ successif, mais, j’ai appris lentement à m’aimer moi — même.

J’ai aimé, car telle est ma nature les petits de mes petits et découvert le plus pur, le plus désintéressé le plus doux de tous mes amours celui de mes petits enfants.

J’oubliais, ma plus grande passion, le monde animal, avec un hommage particulier à mes chats successifs qui m’ont veillé, accompagné, cajolé.

Alors oui, j’ai aimé et j’aime encore, car c’est l’essence même de la vie, ma vie.

 

Sylvie Commare                05/05/2022

 

 

texte de Patricia R

Au sein des falaises de craies nichées sur un lit

d’herbe fraîche, une mouche joue à rebondir sur

la calvitie naissante du prêtre Jean. Elle saute des cheveux en forme de couronne,

au crâne luisant, puis vient se poser sur le tableau ou la craie du religieux délivre

un cours de math au garçon de l’institut catholique <<la croix des vents>>.

 
 
– Louis ! encore en train de rêvasser clame père Jean en tapant avec la règle sur la table !

Effectivement Louis avait remis la craie à Etretat et transformé la tonsure du prêtre en nid

douillet.

Ce n’est pas la première fois qu’il s’évade ainsi. Son impossibilité à se concentrer lui a value beaucoup d’heures de colle et de mauvaises notes.
Ses parents désespérés se saignent pour lui payer cette école ; c’est leur dernier espoir.

Alors Louis lutte vraiment pour ne pas rejoindre Prévert et honorer ses parents, mais

dès que le cours parle de sinus et cosinus, il prend la tangente et part rejoindre les

goélands.

 

Il n’a jamais quitté son village, mais tous les soirs, il lit des romans d’aventures.

Une nuit il est un chevalier foulant un champ de bataille, courageux, mais prêt à

tout accepter, même le déshonneur, pour espérer obtenir que la noble Agathe,

accepte ses hommages. L’amour courtois le transcende. Aimer une femme inaccessible,

la couvrir de poèmes chantés tel un ménestrel, se donner corps et âme pour elle, sans rien en obtenir est un idéal qui le fascine.

Surtout ne pas s’engager et ne rien réussir tel est son let motive.

Parfois il est Sisyphe que les dieux ont condamné à rouler sans cesse un rocher

jusqu’au sommet d’une montagne d’où la pierre retombe par son propre poids.

Peter Pan est sa BD préférée. Il comprend ce petit garçon qui refuse de grandir.

Ils ont certains points de caractère en commun sauf que Louis n’aurait pas bu la

potion et jamais combattu capitaine crochet.

Surtout ne rien réussir
Sartre voulait qu’on naisse lâche ou héros il est né lâche et adore ce sentiment.

Quand il lit le magicien d’Oz, il endosse la crinière magnifique du roi des animaux,

beau noble, mais aime en lui le fait que ce soit un lion peureux. Il jubile.

 

<<Louis ! je suis excédé hurle père Jean ! êtes vous parmi nous ou sur la planète mars ?

Vous me donnerez votre carnet de liaison après le cour>>.

 

Les larmes de Louis coulent, ses parents vont être convoqués. Sa maman va encore

pleurer. Que faire ?

Grandir, devenir un homme ou mettre fin à ses jours. Il n’a personne à qui se confier

pour l’aider à prendre une décision.

Ce soir, le cahier remplit des doléances du père jean, il ne rentre pas chez lui, il longe

la falaise contemplant l’horizon et le vide.

 

 Un goéland argenté niché dans la roche pousse un cri strident. Louis se penche,

se penche : ses yeux scrutent le contrebas, ses jambes vacillent, attirées par le précipice.

 La lune naissante paraît lui assurer qu’elle emporterait son corps loin très loin.

 Les gouttes de sel des embruns de la mer semblent battre la cadence du chant

irrésistible des sirènes.. Les voix mélodieuses l’attirent. . Des cailloux se dérobent

sous ses pieds et glissent dans le vide. 

Comme un lâche il est prêt. Prêt à cesser de lutter dans ce monde qui lui est hostile.

Il contemple une dernière fois l’horizon ; des nuages de coton, moelleux et douillet,

une étendue de duvet et de mousse l’invitent au repos, il se jette dans le vide…

il vole ses ailes pareilles aux voiles d’un gréement. Le rivage de ouate s’approche,

il sourit, est heureux.

 
Soudain une main caresse son visage
— Louis ! tu as de la fièvre, tu as fait un cauchemar. J’appelle le docteur. 
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