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Réseau d'échange des savoirs de Trouville la Haule

08 Nov

ECHANGE ECRITURE 06-11-2020

Publié par Vice versa

Les consignes : écrire un texte avec l'une des phrases suivantes :

Pendant que maman lisait sur la plage, moi je restais dans ma chambre.

ou

C’était la femme du président assise devant le kiosque à musique

 

Les visiteurs

texte d'Angela Howard

Ils étaient trois amis de longue date : Georges Dupont, Charles Canteloupe, et Pépé.  Ils vivaient depuis toujours dans le même village, niché dans une vallée près de Gap, entouré des Alpes, autrefois le théâtre  d’une guerre impitoyable entre résistants et envahisseurs.

Les trois amis avaient pris l’habitude de se promener ensemble en montagne une fois par semaine, et ce fut une promenade différente à chaque fois. Pépé, vieil homme agile sur ses jambes bien maigres, ne pesait que cinquante kilos. En montagne, on avait l’impression qu’il allait s’envoler d’un moment, à l’opposé de Georges et Charles, bien plus ronds et souvent essoufflés ; ils déambulaient derrière Pépé pesamment sur les petits chemins qui serpentaient les pentes. 

« C’est parce qu’il porte un chapeau, »dit Charles à Georges en rigolant lorsqu’ils regardaient Pépé gambader devant eux.

Charles et Georges ne voulaient pas admettre que leurs panses étaient si grandes qu’ils ne voyaient plus leurs pieds ; les saucissons de Madame Crapaud au village étaient trop bons, tout comme ses andouillettes, ne parlons pas du Cognac qui servait à désaltérer les deux amis pour faire leurs dix kilomètres hebdomadaires.  Le médecin du village, le Docteur Pierrot, répétait sans cesse qu’il fallait marcher, marcher, marcher lorsqu’on avait autant de carburant dans le corps.  Il le savait bien, car lui aussi – mais bien en cachette – se délectait du nectar doré de Madame Crapaud.

Georges et Charles refusaient de mettre un chapeau comme Pépé, et cela malgré leur calvitie.  On aurait dit deux vieux moines ;ils avançaient lentement, leur tonsure rougissant de plus en plus sous un soleil qui tapait fort en montagne.

 

Pépé était le guide du groupe, pour ainsi dire.  Lorsqu’ils arrivaient à un croisement de chemins, c’était Pépé qui choisissait la direction à prendre.

« C’est comme s‘il est en mission », dit Georges lorsque Pépé décidait chaque fois. Car Pépé s’arrêtait souvent comme pour regarder la configuration du terrain.

« C’est très bien, très bien qu’il nous dirige, » grommelait Charles, ne voulant pas être dérangé pour prendre des décisions.  Il était juste content d’être avec ses amis, d’être toujours capable de marcher avec eux,  malgré son essoufflement.  Quand à Georges, il aimait bien marcher la tête haute,balançant ses bras au rythme – très lent – de ses pass’imaginant à l’armée, marchant bien obéissant sous les ordres de son capitaine, Pépé, - car le chapeau de Pépé commandait le respect ; Pépé était si capable, si motivé, le plus vieux des trois, léger comme une plume. Il aimait bien ramasser les branches qu’il trouvait en dessous des sapins, les mettant dans son sac à dos avec des pierres pour fabriquer, disait-il, des marteaux d’escalade pour escalader la montagne, tout comme son père l’avait fait pendant la Guerre, disait-il.  Il en avait déjà fabriqué une vingtaine en miniature qu’il avait confiée à Madame Crapaud pour les vendre pendant la saison touristique.

Un matin, pendant une de leurs promenades, les trois s’arrêtèrent un moment pour que Georges et Charles reprennent l’haleine.  Le soleil avait disparu. Les nuages étaient devenus gris et descendaient sur la montagne.

          «Allez, on va rentrer » dit Charles. 

« Vaut mieux, » répondit Georges.

Mais Pépé ne dit rien.  Il regardait la lisière de la petite forêt de pins, là où la bruyère prenait le dessus.  Il leur avait tourné le dos.

« Qu’est-ce qu’il a vu ? » dit Georges.

Des gouttes de pluie commençaient à tomber. Charles s’essuya le crâne.  « Tu nous ramènes, Pépé ?  Nous on n’a pas de képi.  Ni de cheveux. » 

Pépé continua de leur tourner le dos et tendit son bras en direction de la bruyère.

« Oh là là.  Il pleut Pépé. Allons-y, » dit Charles. 

          Mais Pépé était figé sur place.

« Faut qu’on retourne Pépé,» Georges l’appela.  «Tu nous montres le chemin? »

Le bras de Pépé retomba à ses côtés.  Il avait le visage troublé. 

« Pépé, on n’est plus à l’Armée ! Allez, ramène-nous, »s’impatienta Charles. Car il pleuvait à seaux.

Mais Pépé avait toujours le regard lointain.

Georges et Charles s’échangèrent des regards perplexes.  Tous ces petits chemins qu’ils avaient pris pour arriver là, comment les reconnaître ?  Seul Pépé les connaissait, et cela depuis son enfance. 

Finalement Pépé se retourna lentement.  Son visage était toujours figé.  Il avait du mal à se lever, mais il commença à se mettre en route.  Il n’était pas très stable sur ses jambes, mais tout d’un coup il se mit à marcher très vite, la tête penchée en avant.   Georges le suivait de près, Charles essayait de les rattraper !  « Arrêtez, oh là là, attendez moi ! »

La pluie tombait dru, la boue sur le sentier devenait de la gadoue.  Pépé glissa ; son corps tout maigrichon fit une pirouette et il tomba. Il resta là quelques moments à regarder devant lui,les fesses dans la boue.  On aurait dit qu’il ne les voyait pas bien qu’il soit en face d’eux.Georges se pencha pour prendre son bras.  Pépé ne le donna pas.

          «Je pense qu’il faut qu’on le porte, » dit Georges.

Charles reprit haleine,  le visage consterné.Puis Pépé leva la tête.  « Par-là, »dit-il, regardant droit devant lui.

« Mais on vient de là, » protesta Charles.  

« Pan Pan, » dit Pépé.

Les deux se redressèrent et se regardèrent encore une fois.

« Pan ! Pan ! » répéta Pépé, la tête dans la Guerre de son père.

« Cul cul », répondit Charles, désespéré.

Georges frissonna.  «Arrête Charles.   Allez, Pépé, c’est par là, non, le village ? »

Pépé se laissa emmener comme un agneau tout léger, ses jambes toutes maigres, tremblantes, pendant que ses deux amis le portaient.  Sa casquette, complètement trempée, était toujours sur sa tête, mais tordue.

« Allez Pépé, tu vas nous dire où aller, » dit Charles entre deux respirations.  Car ils avaient pris un chemin au hasard.Mais Pépé se taisait et ce fut Georges qui prit le rôle de guide pour la première fois.  Il suivait les traces de leurs bottes qui néanmoins disparaissaient trop vite sous la pluie.

          « Bon Dieu, où tu nous amènes ? »protestait Charles, essoufflé.   La pluie ruisselant depuis son  crâne sur ses joues bien rondes.  Mais Pépé avec ses cinquante kilos n’était pas un vrai fardeau même s’il fallait tout de même  faire un grand effort pour ne pas glisser et bien s’assurer que leur ami ne s’écroule.

Ce fut finalement la cloche de l’église qui sauva les amis ; elle sonna midi dans la vallée comme pour les appeler.  Honorine,la femme du Président du Club des Anciens, les vit arriver au village et c’était un spectacle bien alarmant de voir Pépé tout froissé dans les bras de ses deux amis, la casquette de travers, tous les trois trempés et Charles visiblement fourbu.  Elle envoya chercher le Docteur Pierrot.  Pierrot arriva de suite et ils installèrent Pépé chez lui dans son lit, puis Pierrot fit appel à l’aide-soignante, Madame Denise, pour qu’elle reste à ses côtés.

Car Pépé avait perdu la parole. Et il ne bougeait plus.

Georges et Charles rendaient visite à leur ami tous les jours et, petit à petit avec l’aide de Denise.  Pépé arrivait à se mettre debout.  Mais cela ne durait que quelques secondes. Il balbutiait quelques mots seulement etc’était difficile de le comprendre.

« C’est bon, not’ Pépé, » l’encouragea Georges.  « T’inquiètes, on va retourner à la montagne bientôt. »

« On t’emmène, on t’emmène, » rajouta Charles.

« C’est toi qui vas nous emmener, comme d’habitude, » dit Georges.

Le bras de Pépé était amorphe, mais son doigt commençait à bouger et sa bouche tremblait.  Il faisait beaucoup d’effort et finalement quelques mots mot sortirent.

« Merci mes visiteurs. »

Chaque matin après cela, lorsque Madame Denise lui faisait sa toilette, Pépé disait : « Mes visiteurs. »

Denise pensait qu’il avait perdu la tête.

Petit à petit avec l’encouragement de ses amis, Pépé retrouva de la force dans ses jambes. « Allez, on t’emmène à la montagne,’ disaient Georges et Charles en le guidant autour de sa petite cabane.  « Tu y arriveras. »   Et à Pépé de s’arrêter, de lever lentement son  doigt, de reprendre ses forces  et dire « Merci visiteurs ».

Madame Denise était inquiète : « Il est trop faible, ce n’est pas prudent.  Je vais en parler avec le docteur Pierrot. »

« Mais non, mais non, » dit Georges. 

Pierrot les joues toutes rouges, suite à une visite chez Madame Crapaud, vint lorsque les amis étaient présents.   « Ah ! Not’ Pépé, » il secoua la tête. « Toujours en montagne, chercher son père.  »  Puis il secoua la tête une deuxième fois.  « Pov’ Pépé. »

 

Georges et Charles avaient bien senti la volonté dans les muscles bien raides de Pépé, même si les jambes ne répondaient pas aux ordres de son cerveau.  Ils préparèrent le chemin à reprendre pour gagner l’endroit où Pépé s’était fixé le regard, en empilant des cailloux à chaque bifurcation.  Il faisait beau ce jour-là et ils arrivèrent à la même clairière d’où on avait une très belle vue sur les montagnes.  Ils assirent Pépé sur une bûche pour qu’il puisse contempler le décor. Pendant que Georges et Charles reprirent haleine, Pépé tout d’un coup se redressa, attentif à la scène devant lui.

« C’est beau la montagne, » dit Georges en l’encourageant. « On va rester un peu avant de rentrer chez toi.»

Les lèvres de Pierrot ? ‘Pépé commençait à trembler. Il fallait de l’effort, mais il arriva à dire, « Pan ! Pan !Merci visiteurs. » 

 

 

 

consigne écrire à partir de cette phrase :

c’était la femme du président assise devant le kiosque à musique

 

Amiens 1946 Texte Sylvie Commare

Un vent de renouveau soufflait sur Amiens en ce mois de mars 1946.

 Cela faisait bientôt 2 ans que la Wehrmacht, entendez par là, l’armée allemande, avait desserré son étau sur la ville, chassée par les Anglais et les FFi, après 4 ans de privations, 4 ans d’humiliation infligée à la population. La cathédrale, miraculeusement épargnée par l’incendie et les bombardements dressait fièrement son clocher dans une cohorte de nuages au milieu d’une ville à demi détruite et réduite en cendres.

Marie accompagnée de son fils Claude, comme à l’accoutumée, profitait de son repos dominical pour aller se recueillir sur la tombe de Philibert, son cher époux. Toute de noire vêtue, ainsi que son fils, elle longeait les  boulevards et avenues, en direction du cimetière, en guise de sortie récréative. Claude adolescent docile, suivait, Claude rongeait son frein tout en maudissant intérieurement ce fichu pardessus noir qui entachait ses plus belles années de jeunesse. Non seulement, il était pupille de la nation, orphelin de guerre, mais encore, à ce titre l’insouciance liée à son âge lui était refusée. Mais jamais, au grand jamais, il n’aurait voulu chagriner Marie.

Marie, sujette à la neurasthénie, depuis sa puberté, avait réussi, en ce début de printemps à chasser l’encre noire qui se répandait parfois dans sa tête et marchait d’un bon pas, les narines palpitantes à l’odeur des narcisses en fleurs .Elle se sentait renaître, elle se sentait revivre.

Il n’était que trois heures de l’après-midi sur le chemin du retour, lorsqu’elle entendit de la musique en direction du parc de la Hotoie. Philibert les avait souvent emmenés écouter des concerts et regarder la fanfare municipale. Elle se dit que cela faisait maintenant 6 ans qu’elle observait le deuil, il ne serait donc pas inconvenant de prendre quelques minutes de bon temps                            .

Au dernier rang, ils trouvèrent deux chaises de libres et s’installèrent. Marie étendit ses jambes fines endolories par leur longue marche et s’abandonna aux mélodies romantiques jouées par l’orchestre de Lille en ce beau dimanche de mars. Son esprit surfait sur les vagues des notes acrobatiques et tout son corps vibrait de ses sons sensibles et harmonieux. L’espace d’un instant, elle en oublia l’univers. Un bruit de chaise disgracieux la ramena à la réalité, elle ouvrit ses yeux mi-clos et aperçu Claude qui était toujours  à côté d’elle ; sa vie lui revint à la figure comme un boomerang.

 

Au premier rang, arborant une toilette coûteuse  et un chapeau extravagant, se tenait la femme du maire avec toute une kyrielle d’enfants en vêtements d’apparat et souliers vernis.

Marie bouillait en son for intérieur et réprima un : « Il y en a qui ne manque de rien à ce que je vois et qui ne travaille guère, ils pourraient aider leurs paroissiens. »

 Elle se pinça et ravala sa colère. Membre d’une dynastie de pêcheurs, elle ne s’abaisserait pas à crier sa pauvreté. Comme ses aïeux, elle se battrait bec et ongles pour élever son Claude, sans devoir rien à personne,  dans la dignité et l’honnêteté, elle lui offrirait une situation  comme on disait à Elétot; elle ne savait pas encore comment, mais elle y parviendrait, elle en était persuadée. Ses prières à la vierge Marie, dont elle portait le nom ne pouvaient pas indéfiniment rester inexaucées.

Et leur vie quotidienne reprit, contre vents et marées, son cours plus routinier que jamais.

FIN

photos Cabesty

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PLAGE Texte de Patricia R.

Pendant que maman lisait sur la plage, moi je restais dans ma chambre.

Je ne souhaitais pas être là pendant qu’elle prenait connaissance de mon premier livre.

Je donnais tout dans ce tapuscrit, je me mettais à nue. Je ne voulais pas voir ses lèvres se crisper en lisant les chapitres sur mon enfance ratée et je ne voulais pas voir ses grands yeux bleus inondés de larmes quand j’ouvrais mon cœur et clamait haut et fort mon amour pour elle.

Je l’imaginais assise sur sa serviette saumon posée le sable, avec son maillot vichy, ses cheveux châtains aux mèches plus claires illuminées par le soleil. Je voyais ses mains aux ongles peints tourner les pages de mon roman. J’espérais qu’elle le lirait jusqu’au bout, je n’avais pas hâte qu’elle rentre.

Si elle revenait avant la nuit, elle ma première lectrice, cela signifiait que mon bouquin était une daube. S’il lui était tombé des mains, je devais abandonner mes rêves d’écrivaine et retourner à mon boulot de comptable.

C’était l’été, nous avions loué une maison à Deauville face à la mer.

Ma chambre donnait sur le côté ville. J’avais chaud, je me penchai à la fenêtre et je vis au loin la femme du président assise devant le kiosque à musique.

Je reconnus ses cheveux blonds coiffés comme Mireille Darc, ses jambes maigres, mais surtout, je savais que ce week-end, elle n’était pas au Touquet et passait le week-end à Deauville pour écouter un concert en faveur d’une association Agir et vivre l’autisme.

Avec son tailleur lavande et son masque muni d’un petit drapeau français, elle se trémoussait comme elle aimait le faire dès qu’il y avait trois notes de musique.

Le maire de Deauville, Philippe Augier, debout prés des petits fours, un verre à la main était ravi. Il adorait Brigitte qu’il trouvait dévouée et généreuse.

Moi, je ne partageais pas les idées politiques de son mari, mais leur histoire d’amour passionnée et absolue me les rendait sympathiques.

Soudain, un éclair déchira le ciel, le tonnerre retentit et la pluie tomba en rafale.

Brigitte se mit à l’abri sous le kiosque et j’entendis ma mère rentrer.

Déjà ! Le verdict allait être donné. J’angoissais.

— alors ? Lui dis je sans la regarder.

— alors quoi ?

–Mon livre, tu as aimé ?

- Comment veux-tu que j’aime qu’on me représente en catin, assoiffée d’argent, marâtre et infidèle ? dit ma mère en séchant ses cheveux avec une grosse serviette éponge.

–C’est un roman maman, c’est une fiction ..Il y a du faux et du vrai.

- Et ton père, tu en as fait un ivrogne, immonde et cruel ! dit-elle en colère.

–Maman j'ai juste retracé notre vie et le calvaire que vous m’avez fait subir et que tu as subis. Je n’aurais pas dû te le donner à lire, tu n’étais pas prête, tu n’as pas fait ton deuil, lui dis-je en prenant ses mains.

–Lâche-moi sale traître, tu as sali la famille. Je ne veux plus te voir. Elle fouilla dans son sac, jeta les feuilles de mon « œuvre » par terre, claqua la porte de ma chambre et courut s’enfermer dans la sienne.

En pleurant, je rassemblais mes feuilles éparpillées. Elle n’avait pas tous lu elle n’avait pas vu mes déclarations d’amour à son égard. Elle s’était fermée dés les premiers chapitres et avait du clore le livre en rageant.

Dehors le soleil était revenu, l’orchestre avait repris et Brigitte dansait.

 

Pendant que maman lisait sur la plage, moi je restais dans ma chambre.

Je ne souhaitais pas être là pendant qu’elle prenait connaissance de mon premier livre.

Je donnais tout dans ce tapuscrit, je me mettais à nue. Je ne voulais pas voir ses lèvres se crisper en lisant les chapitres sur mon enfance ratée et je ne voulais pas voir ses grands yeux bleus inondés de larmes quand j’ouvrais mon cœur et clamait haut et fort mon amour pour elle.

Je l’imaginais assise sur sa serviette saumon posée le sable, avec son maillot vichy, ses cheveux châtains aux mèches plus claires illuminées par le soleil. Je voyais ses mains aux ongles peints tourner les pages de mon roman. J’espérais qu’elle le lirait jusqu’au bout, je n’avais pas hâte qu’elle rentre.

Si elle revenait avant la nuit, elle ma première lectrice, cela signifiait que mon bouquin était une daube. S’il lui était tombé des mains, je devais abandonner mes rêves d’écrivaine et retourner à mon boulot de comptable.

C’était l’été, nous avions loué une maison à Deauville face à la mer.

Ma chambre donnait sur le côté ville. J’avais chaud, je me penchai à la fenêtre et je vis au loin la femme du président assise devant le kiosque à musique.

Je reconnus ses cheveux blonds coiffés comme Mireille Darc, ses jambes maigres, mais surtout, je savais que ce week-end, elle n’était pas au Touquet et passait le week-end à Deauville pour écouter un concert en faveur d’une association Agir et vivre l’autisme.

Avec son tailleur lavande et son masque muni d’un petit drapeau français, elle se trémoussait comme elle aimait le faire dès qu’il y avait trois notes de musique.

Le maire de Deauville, Philippe Augier, debout prés des petits fours, un verre à la main était ravi. Il adorait Brigitte qu’il trouvait dévouée et généreuse.

Moi, je ne partageais pas les idées politiques de son mari, mais leur histoire d’amour passionnée et absolue me les rendait sympathiques.

Soudain, un éclair déchira le ciel, le tonnerre retentit et la pluie tomba en rafale.

Brigitte se mit à l’abri sous le kiosque et j’entendis ma mère rentrer.

Déjà ! Le verdict allait être donné. J’angoissais.

— alors ? Lui dis je sans la regarder.

— alors quoi ?

–Mon livre, tu as aimé ?

- Comment veux-tu que j’aime qu’on me représente en catin, assoiffée d’argent, marâtre et infidèle ? dit ma mère en séchant ses cheveux avec une grosse serviette éponge.

–C’est un roman maman, c’est une fiction ..Il y a du faux et du vrai.

- Et ton père, tu en as fait un ivrogne, immonde et cruel ! dit-elle en colère.

–Maman j'ai juste retracé notre vie et le calvaire que vous m’avez fait subir et que tu as subis. Je n’aurais pas dû te le donner à lire, tu n’étais pas prête, tu n’as pas fait ton deuil, lui dis-je en prenant ses mains.

–Lâche-moi sale traître, tu as sali la famille. Je ne veux plus te voir. Elle fouilla dans son sac, jeta les feuilles de mon « œuvre » par terre, claqua la porte de ma chambre et courut s’enfermer dans la sienne.

En pleurant, je rassemblais mes feuilles éparpillées. Elle n’avait pas tous lu elle n’avait pas vu mes déclarations d’amour à son égard. Elle s’était fermée dés les premiers chapitres et avait du clore le livre en rageant.

Dehors le soleil était revenu, l’orchestre avait repris et Brigitte dansait.

Demain je retournerai à la compta et elle à l’Élysée ; comme elle je devrais faire semblant d’être heureuse et cacher sous mon masque mes larmes de lassitude.

Demain je retournerai à la compta et elle à l’Élysée ; comme elle je devrais faire semblant d’être heureuse et cacher sous mon masque mes larmes de lassitude.

Maman pourquoi tu n’as pas tout lu ?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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